Traversée de nuit d’un village, Somme, février 1917

À l’aveugle, les files pesantes d’ombres, hautement et largement chargées, se bousculent : chaque flot, poussé par celui qui le suit, heurte celui qui le précède. Sur les côtés, évoluent, détachés, les fantômes plus sveltes des gradés. Une sourde rumeur, faite d’un mélange d’exclamations, de bribes de conversations, d’ordres, de quintes de toux et de chants, monte de cette dense cohue endiguée par les talus. Ce tumulte de voix est accompagné par le roulement des pieds, le tintement des fourreaux de baïonnette, des quarts et des bidons métalliques (…) Et c’est une masse telle qui piétine et s’étire sur la montée de la route que, malgré le dôme infini de la nuit, on nage dans une odeur de cage aux lions.

Henri Barbusse, Le feu, 1916

CHARLES HOFFBAUER

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