La Bourrasque à Sillery, Champagne

O

n restait quatre jours en ligne et l'on redescendait pour quatre jours à l'arrière, et l'on remontait à l'avant pour quatre jours, et ainsi de suite jusqu'à la fin s'il devait jamais y avoir une fin à cette triste histoire ... Il ne manquait qu'une sirène à l'entrée des boyaux - une sirène et une horloge et un système de contrôle à poinçon qui leur aurait délivré une fiche et un petit portillon à fermeture automatique - pour rappeler aux pauvres bougres leur boulot à l'usine, sans rien dire des blessés qui croyaient en être quittes et qui remontaient, et qui remettaient ça, à l'usine de la mort, une fois, deux fois, trois fois, quatre jours en première ligne, quatre jours dans les cantonnements de l'arrière.

Blaise Cendrars,
La main coupée, 1946

Les dessins de Léon Broquet

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