Route du Mt St Eloi à Camblain-l’Abbé, 11 déc 1915
La pluie redouble, la tempête grandit… La longue théorie silencieuse et souffrante s’espace de plus en plus sur la route. Les hommes tombent dans les fossés. D’autres qui ont les pieds en sang, les jambes ankylosées, la face brouillée par l’eau, avancent sans proférer une plainte. Je songe avec angoisse que nous avons fait douze kilomètres, et qu’il nous en reste dix à faire. Pour comble, à tout instant, passent des convois en sens inverse… Les voitures, brutalement, nous rejettent dans le bas côté où l’on s’enfonce à pleine boue jusqu’à la cheville, roulent sur les pieds meurtris, avec la muflerie des charretiers pour les pauvres biffins.